Sur la PàL - Mars 2024

Mémoire de métal - Alastair Reynolds

Mémoire de métal - Alastair Reynolds
Bragelonne // 2021 (Vo 2015) // 264p

Alastair Reynolds est définitivement l’un de mes auteurs de SF favoris, et ceci depuis ma découverte de l’auteur avec l’espace de la révélation en 2007. Depuis j’ai dévoré avec passion toutes ses publications françaises à l’exception du premier tome de Vengeresse mais parce que la suite ne semble hélas pas être au programme. Et c’est bien l’un des gros problèmes, c’est que cet auteur est un peu abandonné chez nous. Ses traductions arrivent au compte goute, et je désespère de le voir édité correctement un jour.

Enfin bon l’année dernière est tout de même parue Mémoire de métal, traduction d’une novella ayant remporté le prix Locus du meilleur roman court en 2016.

Une parution qui arrive trois ans après la sortie du tome 1 de Vengeresse… Ouais, un auteur abandonné… Et c’est bien triste tellement il est bon et sympathique (Je garde un excellent souvenir de ma discussion de 20 minutes avec lui lors d’une rencontre à la librairie Charybde).

Mais bref, nous sommes ici pour parler de Mémoire de Métal.

* * *

Après une guerre sanglante aux motifs flou mais dont on sait simplement qu’elle implique deux versions d’un Livre religieux, un armistice est signé dans la galaxie.

Malheureusement pour Scur, les nouvelles ne voyagent pas aussi vite pour tout le monde et c’est après cette signature qu’elle est capturé et torturé par le criminel de guerre Orvin.

Elle est laissé pour morte mais contre toute attente survit et reprend conscience à bord du Caprice, sorte de vaisseau prison qui à amassé près d’un millier de militaire des deux camps et civils, tous plus ou moins des criminels ou des rebus de la société. Malheureusement, quelque chose à merdé pendant le saut et le vaisseau et ses habitants, prisonniers et équipage ne savent ni où ni quand ils sont. Pour ne rien arranger, la mémoire du vaisseau a été endommagé irrémédiablement, entrainant un cycle de destruction progressive de sa mémoire qui sera vide de toute connaissance à plus ou moins brève échéance.

* * *

Si le postulat de base est assez classique, un gros vaisseau échoué et des gens contraint à la coopération pour la survie, Alastair Reynolds y applique un traitement plutôt original et intéressant et en profite pour développer un certain nombre d’idées et réflexions.

Le point central du récit, c’est la mémoire donc, car si la survie immédiate est assuré par des réserves conséquente de nourriture et un engin suffisamment moderne pour recycler correctement air et eau, l’échéance plus lointaine concerne la sauvegarde de connaissance qui s’avéreront cruciale pour sauvegarder la société, voir la reconstruire.

On voit ainsi se développer une culture de l’écriture, où chacun, conscient de vivre une course contre la montre travail à sauvegarder des morceaux de connaissance. Sur les murs du vaisseau ou sur leur corps.

Mais avec l’idée de balle lente, c’est la mémoire personnelle qui entre en jeu aussi. Puis cette technologie, ancrée dans la chair des soldats porte en elle la mémoire de leur vie. Mémoire de leurs actes, et nombreux sont ceux qui aimeraient pouvoir les effacer puisqu’il y a beaucoup de criminel de guerre, mémoire de leur vie privée comme avec Scur, notre héroïne qui porte en elle les portraits de ses parents, derniers vestiges d’une vie lointaine perdue à jamais.

* * *

Évidemment tout n’est pas rose dans la novella de Reynolds, et il va falloir du travail pour passer au-delà des conflits, arriver à s’entendre pour un but commun, et là aussi la question de la mémoire est centrale. Comment oublier le passé, pardonner, en faire abstraction. Ce n’est pas toujours évident de laisser les rancunes derrière soi, même quand la survie est en jeu.

Alastair Reynolds développe aussi d’intéressante réflexions sur la religion, et la croyance, sur ce qu’elle peut apporter de bénéfique à l’individu, mais aussi la manière dont la croyance irraisonnée tend à nourrir les conflits, sur l’importance culturelle qu’elle représente aussi pour les sociétés.

Les réponses que Reynolds apportent sont étonnamment positive je trouve, pleine d’un optimisme que certains pourraient peut-être qualifié de naïf mais qui montre bien le désir de l’auteur (comme avec son excellente trilogie des enfants de Poséidon) de proposer des futurs plus désirables et lumineux. Ce n’est pas niais pour autant, le conflit y est présent, les difficultés, les souffrance et les épreuves aussi, mais les résolutions offre des portes de sortie souhaitable et c’est agréable. 

*  *  *

Un dernier mot sur l’écriture de Reynolds qui est très agréable comme toujours. Son mélange entre le sens de l’émerveillement, une SF tangible et presque technique et des personnages nuancé et pleins d’aspérités fonctionne toujours. On notera aussi qu’il a un talent certain pour écrire des passage qui s’apparentent à l’horreur et qui fonctionnent à fond.

On a pu le voir dans le cycle des inhibiteurs et son ambiance gothique oppressante, ou avec les nouvelles d’horreur que sont les excellentes Diamond Dogs ou Beyond the Aquila Rift et je me prend à rêver qu’il se lance dans un pur roman space opera d’horreur cosmique.


D'autres avis : Herbefol, Le Maki, L'épaule d'Orion






Commentaires

  1. C'est vrai que c'est dommage, il est assez peu publié alors que c'est de la SF de qualité :) Bon je vais passer mon tour par contre, novella tout ça tout ça !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Mais il fait presque 200pages, c'est presque un roman :p

      Supprimer

Enregistrer un commentaire